lundi 25 avril 2011
Carnet de routes
Je ne peux décemment pas quitter le voyage qui vient de se terminer sans évoquer la route. Elle est toujours un élément déterminant de nos périples.
Aux Etats-Unis, plus qu'ailleurs, elle fait partie de nos plaisirs de voyage. Davantage qu'un environnement traversé, c'est mon paysage que je transporte durant les milliers de kilomètres enfilés chaque année. La conduite me permet de rêver, de quitter la chaussée pour des ailleurs. (Il m'arrive aussi de nous égarer, ce qui me vaut le surnom éternel -et flatteur- de "roi des demi-tours").
J'aime les routes, le bitume, les arrêts aux stations-service, les pauses et la brume. Les voitures en tant que mécaniques me laissent froid, ce sont des coquilles qui me réchauffent.
En maniant le paradoxe, je dirais qu'un voyage reposant est un voyage où j'ai beaucoup roulé. Peut-être une réminiscence de l'enfance où repartant de Corrèze à la fin août, je m'allongeais sur le siège arrière et me reposais pendant qu'il pleuvait sur les vitres. Pour les copains de classe, la route du retour était un long calvaire vers l'école ; je la savourais comme le dernier bonbon des vacances.
Une dizaine de Bob Morane faisaient mon bonheur durant la journée que prenait le voyage aller. Pendant cette route, tout était possible, les rencontres étaient prêtes à être vécues, l'habitacle propre, pas encore peuplé des trésors de l'été.
S'il s'agit d'une voiture louée, offrant des angles de vue inconfortables, un siège baquet pour s'asseoir le souffle coupé, qu'importe. En deux jours, la gêne est apprivoisée, je m'y love, une histoire de matrice, sans doute...
Je parlais de voyage aller... Au fond, je crois que je n'aime que les circuits où la découverte est permanente, les vues inédites. Pour poursuivre sur la même lancée, les hôtels d'une nuit ont ma préférence sur les maisons de famille pour un mois.
L'idéal étant, l'été dernier, de quitter le camping au matin, sans laisser d'autre trace que les herbes comprimées par les matelas, qui ont été vite remises d'aplomb par quelques rayons de soleil bien sentis.
Un de mes plus étonnants voyages s'est déroulé au Sénégal, dans un taxi-brousse qui nous menait, Madame et moi, de Dakar à Saint-Louis. Cinq heures de route, de cahots, de détours par des chemins de terre et de détours de détours. Des champs de baobabs, la radio qui devait scander des sourates et la perte de la notion de temps, une sorte de transe dont on sort l'esprit essoré.
Et si la route est fermée ? On fait demi-tour. Mais il n'existe pas, ce demi-tour, disions-nous voici deux mois avec les enfants. On ne roule jamais deux fois sur les mêmes pavés. C'est aussi un des grands plaisirs du voyage pour le bavard que je suis ; me taire. Et puis commenter la route, s'arrêter. Rentrer. Et puis préparer le prochain voyage. Et repartir.
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7 commentaires:
Definitely on the same page for every single word ...
C'est peut-être ce qui m'aura manqué ici : prendre une voiture, et la route. J'ai un souvenir éblouissant et paisible de notre périple avec des amis, ici, en Utah principalement, de camping en camping ...
Vous avez su extraire la substantifique moelle de ce pays en voyageant ainsi
;)
très beau texte, ravie que cette route passe un jour par chez moi.
Tu as su effectivement resumer une partie de l'âme de beau ce pays, mon cher yibus.
Magnifique texte qui va a la famille InPhoenix aussi comme un gant.
Nos plus beaux voyages furent les itinerants, avec une mention particuliere, pour la non sportive que je suis, avec la marche... Et une sensation decuplee de communion.
Bon retour a DC.
Ah je viens de suer sang et eau sur le texte que j'avais promis et je t'ai mis en lien...
http://nathinphoenix.blogspot.com/2011/04/adoption-made-in-arizona.html
Bises de Nath
Yibus se fait philosophe , j'aime bcp cette vision de la route et la partage.
> La puce : difficile à exprimer tant ce pays est varié, parfois explosé (en tout cas explosif) et cependant réuni sous une même bannière. Ce sentiment de patriotisme (malgré tout, aurais-je envie d'ajouter) m'a fasciné durant ces quatre ans.
> Ariana : tous les -beaux- chemins mènent chez toi, ma chère.
> Tribulete : si cela a pu se ressentir avec quelques mots, tant mieux.
> Nath : merci. La marche est, en effet, une autre route à suivre.
> Helen : parfois, quand je me laisse aller, je cède à la philosophie.
J’ai toujours aimé ‘’partir’’. Avec le temps, le ruban des autoroutes insipides m’insupporte parfois quand même.
Et clin d’œil mathématique, mais pourtant véridique, j’ai 2 fois plus de plaisir à emprunter l’autoroute 40 plutôt que la 20 pour faire le trajet Québec-Montréal.
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